Courir. Juste courir. Ces deux mots ont repris tout leur sens il y a quelques temps, après une longue période où la course était devenue secondaire, presque une corvée. Les compétitions, les entraînements à répétition, la quête permanente de la performance avaient fini par m’éloigner de ce que j’aimais dans la course. J’avais perdu l’envie, et mes chaussures prenaient la poussière au fond d’un placard. Mais un jour, presque par hasard, j’ai décidé de partir courir, sans but ni objectif précis. Et là, j’ai ressenti une sensation que je pensais avoir perdue : la simple et pure liberté de courir pour moi. C’est ainsi que j’ai repris goût à la course, redécouvrant sa vraie valeur, loin de la pression des chronos et des classements.
Courir pour soi : Quand le chrono perd son sens
À une époque, courir faisait intégralement partie de ma routine. Je me levais à l’aube pour m’entraîner, je chronométrais chaque sortie et analysais chaque détail pour m’améliorer. Le temps, le nombre de kilomètres, les records personnels étaient devenus les indicateurs de ma réussite. Les réseaux sociaux n’arrangeaient rien : chaque performance partagée était une invitation à la comparaison, un défi tacite lancé à soi-même.
Puis est arrivée cette période de lassitude, où l’enthousiasme s’est éteint. Pendant presque quatre ans, la course est passée au second plan. J’avais besoin de m’éloigner de cette logique de compétition, de m’épargner cette pression qui m’empêchait de profiter pleinement de l’instant présent. Je me souviens d’une période où, chaque fois que je sortais pour courir, je ressentais une sorte de lourdeur, une impression de devoir, presque de contrainte. La course n’était plus ce moment libérateur que j’avais connu à mes débuts, mais un enchaînement d’obligations que je m’imposais moi-même.
Un jour, au début du printemps, alors que je me promenais sur une colline proche de chez moi, quelque chose a changé. L’air était doux, la lumière du soleil filtrait à travers les feuilles, et j’ai ressenti une envie spontanée de courir, comme quand j’étais enfant. Sans réfléchir, j’ai enfilé mes chaussures, laissé mon téléphone à la maison, et je suis sorti pour une courte boucle. Il n’y avait pas de montre pour mesurer, pas de kilomètres à atteindre. J’ai couru pour le plaisir, tout simplement, et à chaque foulée, j’ai senti cette sensation de liberté revenir. C’était comme retrouver un vieil ami après des années de séparation.
Une aventure solitaire : Face à soi-même
Il n’y a rien de plus authentique que ces moments où l’on se retrouve seul sur un chemin, sans rien d’autre à prouver qu’à soi-même. Courir m’a toujours permis de me confronter à mes pensées, parfois inconfortables, souvent inspirantes. En reprenant la course sans pression, j’ai découvert à quel point cette confrontation avec soi-même pouvait être salutaire.
Je me souviens d’une sortie particulièrement marquante, l’hiver dernier. C’était un matin glacial, et la brume couvrait la montagne près de chez moi. J’avais décidé de sortir tôt, avant que la maison ne s’éveille. Le sol était gelé, le souffle se transformait en nuage blanc à chaque expiration, et j’étais seul. Courir dans ce silence, loin de l’agitation du quotidien, m’a donné un sentiment de calme absolu. Chaque pas semblait me rapprocher un peu plus de cette paix intérieure que je recherchais. À cet instant, la course n’était pas une compétition, mais un moment pour moi, un instant où j’étais à la fois l’acteur et le spectateur de mon propre voyage.
La course comme un moment de liberté
Ce qui m’a redonné goût à la course, c’est cette liberté retrouvée, ce sentiment de pouvoir décider de chaque détail de mes sorties. Les matins où je choisis de partir tôt, sans plan précis, sont devenus des moments privilégiés, des parenthèses loin des obligations de la vie quotidienne. Ce n’est plus le chrono qui détermine la qualité de ma course, mais les sensations, le vent sur mon visage, la beauté du paysage qui défile autour de moi.
Je me rappelle d’une sortie en montagne, lors d’un week-end dans les Alpes. J’avais décidé de partir explorer un sentier que je ne connaissais pas. J’ai gravi des montées abruptes, traversé des ruisseaux glacés, et atteint un sommet d’où la vue sur les vallées environnantes était à couper le souffle. Il n’y avait personne, pas de ligne d’arrivée, pas de médailles, seulement moi et la nature. Cette sensation de liberté, d’être en harmonie avec le monde autour de moi, m’a rappelé pourquoi je cours. La course est bien plus qu’un sport : c’est une évasion, une connexion avec soi-même et avec ce qui nous entoure.
Redonner du sens à ses foulées
En reprenant la course, j’ai appris à redéfinir ce qu’elle signifiait pour moi. Désormais, chaque foulée est une célébration du mouvement, un moment où je choisis de ne penser qu’à ce que je ressens, à ce que mon corps me dit. Il n’y a plus de place pour la comparaison, seulement la recherche de cette sensation de bien-être. J’ai découvert que ce n’est pas dans les records et les compétitions que je trouve la satisfaction, mais dans ces moments où je cours juste parce que j’en ai envie.
Un exemple qui me vient en tête est celui d’un trail auquel je me suis inscrit il y a quelques mois, sans objectif précis. Au départ, au lieu de me focaliser sur le chrono, j’ai décidé de simplement profiter de l’expérience. J’ai pris le temps de discuter avec d’autres coureurs, d’apprécier les encouragements des spectateurs, de sentir l’énergie autour de moi. Ce jour-là, je n’ai pas battu mon meilleur temps, mais je suis rentré chez moi avec le sentiment d’avoir vécu quelque chose d’authentique, de vrai.
Retrouver la beauté de courir pour le plaisir
Aujourd’hui, courir est redevenu ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : un plaisir. Cette approche libre me permet de retrouver, chaque jour, un peu de cette essence qui m’avait tant attiré quand j’ai commencé à courir. Que ce soit un matin d’hiver, une fin de journée ensoleillée, ou une sortie improvisée en forêt, chaque moment passé à courir est une opportunité de me reconnecter avec moi-même, sans pression, sans objectif externe.
La prochaine fois que je prendrai la route, ce ne sera ni pour battre un record, ni pour accumuler des kilomètres, mais simplement pour ressentir cette joie brute et sincère de courir. Parce qu’en fin de compte, la seule personne que j’essaie réellement de dépasser, c’est celle que j’étais hier. Et chaque fois que je franchis le seuil de ma porte, prêt à m’élancer, je sais déjà que c’est une victoire.
J’aime bien ce billet et je m’y retrouve pas mal. Peut-être même que le plaisir d’être là à courir va au-delà de me surpasser ou me dépasser. Je ne me pose même plus cette question. Et j’aime aussi le silence, la quiétude. Le soir très tard pour ma part.